Il soupira.
Vraiment, Valerius, tu étais encore plus cinglé que je ne le pensais.
La légende qui courait à propos de la décision prise par son frère et prédécesseur recelait plus qu’un fond de vérité, mais Aloysius ne parvenait pas à trancher. Les rumeurs sur ce qui se passait à cet endroit contribuaient à troubler le sommeil de personnes aussi puissantes que dangereuses. Et donc à maintenir le pouvoir chancelant de la lignée impériale.
L’Empereur n’était pas un idiot. En tous cas, il lui arrivait fréquemment en observant les autres de constater qu’il n’était pas le dernier des imbéciles, loin s’en fallait. Mais depuis son accession bien involontaire au pouvoir, il voyait la liste des décisions difficiles ou répugnantes s’allonger de jour en jour. Le fardeau de son titre pesait bien lourd, en vérité, et cela n’allait
pas en s’arrangeant. Cela n’ira jamais en s’arrangeant.
point le souverain détestait cet endroit. L’homme détourna les yeux, pour surveiller à nouveau les alentours. La petite tonnelle discrète dans ce coin des jardins réservé à l’Empereur était particulièrement soignée. Le choix des essences, des couleurs et même l’arrangement des fleurs était exquis.
Pour la millième fois, au moins, Aloysius eut un frisson de malaise. Oh, comme il répugnait à venir ici. Et comme il détestait ce qui s’y passait. Il n’y avait qu’un seul endroit au monde qui soit pire à ses yeux, et encore… il ne devait pas s’y rendre aussi souvent. Il pinça les lèvres et s’efforça de respirer plus lentement, mais cela revenait à inhaler davantage les parfums délicats tout autour de lui. J’aurais dû depuis longtemps faire détruire tout ceci. Ou le convoquer dans mon cabinet de travail pour…nos discussions.
Mais le bureau où il passait tant de temps était son sanctuaire. Le seul endroit dans tout ce foutu palais où il pouvait réfléchir tranquille, entouré par ses livres. Alors…
Un bruit infime, mais délibéré, signala l’arrivée de son interlocuteur. Il aurait pu se faufiler jusqu’à l’Empereur sans guère d’efforts, malgré la vigilance des prétoriens, mais le crissement des graviers témoignait d’un certain respect courtois envers Aloysius. Un respect qui était très loin d’être réciproque. Le maître de Celalta n’éprouvait ni colère, ni mépris envers celui qui s’approchait. Mais ce qu’il représentait, ce qu’il faisait en son nom, répugnait au souverain.
devenus un monument végétal baroque au pouvoir impérial. Chef d’oeuvre funeste
et splendide du maître jardinier de l’Empereur.
De son maître assassin.