Le règne d’Aloysius D’Ambrosia

De IC 985 à IC 995 (l’année en cours)

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Pour la plupart de ses sujets, l’Empereur est un homme distant, taiseux et difficile à cerner. Il fait parfois preuve d’un esprit de décision surprenant, et demeure anormalement silencieux à d’autres moments. Beaucoup le voient comme indécis et pour certains, il n’est qu’un symbole, sans réel pouvoir. Cela tient pour bonne part au fait que pendant la majeure partie de son règne, l’Empereur a été surtout occupé à identifier ses alliés et ennemis, réparer les catastrophes causées par son prédécesseur et maintenir l’essentiel de son pouvoir face à une multitude d’opposants aux ambitions divergentes. Depuis deux ans, environ, les choses ont pris une autre tournure et cela commence à se voir.

Si l’on devait résumer les orientations politiques d’Aloysius, on pourrait mettre en avant plusieurs points saillants : redéfinir le champ d’action du pouvoir impérial et le consolider, accroitre l’autonomie financière du trône et enfin, donner confiance au peuple sur l’avenir de la nation. Le souverain espère restaurer l’aura ternie de la lignée impériale, mais surtout circonvenir ses principaux opposants, afin de stabiliser l’Empire et éviter que les familles les plus puissantes suivent l’exemple de la Ligue.

Les conséquences de l’armistice
Les agents du Mandato Diligente et certains partisans d’Aloysius au sénat ont confirmé à l’Empereur que les ambitions de ses « loyaux vassaux » avaient été éveillées par la Guerre Civile et sa conclusion pour le moins ambigüe.  Ces dix dernières années, les puissantes maisons patriciennes se sont surtout affairées à accroitre leur pouvoir en se disputant les restes des maisons défuntes, ou les possessions à l’intérieur des frontières actuelles de l’Empire des familles passées à l’ennemi. La situation sur ce plan s’est progressivement stabilisée, et les parties impliquées sont passées à une phase d’observation mutuelle, tout en se disputant les derniers restes. Du point de vue d’Aloysius, les prochains changements viendront certainement de ses vassaux les plus puissants (les Bellacqua ou les Facilis par exemple) ou de ceux qui ont été durablement fragilisés par le conflit, comme les Borellus. Cependant, la situation est assez complexe et des familles auparavant moins remarquables peuvent être à la source de nombreuses surprises… le souverain peut à l’inverse se reposer sur les Aelius, mais aussi les Caledus et dans une moindre mesure les Oranius.

L’essor des Patriotes
Ce courant au Sénat n’a cessé de gagner en influence parmi les sénateurs durant les 11 années du règne de Valerius IV et depuis le couronnement d’Aloysius. Les Patriotes les plus déterminés pressent les autres d’agir pour pousser l’Empereur à renoncer à plusieurs de ses prérogatives. Cependant, ce sont les modérés (notamment la baronne Lucretia Minerus) qui restent les plus influents au sein des Patriotes, qui ne parviennent donc pas plus que les autres courants du Sénat à présenter un front uni. Les plus impatients se montrent problématiques car ils tentent systématiquement de faire de l’obstruction lors des débats sénatoriaux.
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Les manigances des Facilis
Même les plus naïfs des patriciens comprennent que les liens entre l’Empereur et la maison Facilis constituent une alliance basée sur des intérêts divergents, et parfois même antagonistes. Pour ceux qui auraient encore des doutes, il suffit de considérer le cas de l’ex-impératrice Beatrix. Il est bien entendu que la veuve de Valerius, accusée par le nouvel empereur d’avoir causé la mort de sa famille, ne doit sa survie qu’à l’influence de sa parentèle. Dix ans après le couronnement d’Aloysius et l’exil près d’Adranto de Beatrix,  la situation est restée en l’état. La veuve de Valerius IV est toujours assignée à résidence, mais cela fait longtemps qu’on n’a plus parlé de procès ou de condamnation à mort. Cela en dit long sur l’équilibre prudent  qu’Aloysius et Julius Facilis maintiennent dans leurs rapports compliqués. Les ennemis des Facilis et les Patriotes aimeraient beaucoup briser cette alliance, mais en dépit de son apparente fragilité, cela s’est avéré impossible en raison du principal enjeu sur lequel elle repose. Les Facilis se concentrent en effet sur les deux héritiers du trône, qui leur sont apparentés, tout en s’efforçant d’être indispensables à Aloysius. Ce dernier ne les contrecarre pas directement mais négocie âprement chaque faveur, chaque geste dans la direction de ses alliés.

Si le prince Raffaele s’est montré assez réceptif aux suggestions des Facilis, il ne l’est pas autant que le souhaitent Julius, ou même l’ex-impératrice Beatrix. Tous deux ont compris que Raffaele respectait l’Empereur, à défaut de l’aimer, mais surtout qu’il écoutait les suggestions de sa sœur si précoce, Leto. Cette dernière est l’objet d’une observation attentive de la part des Facilis, qui s’efforcent (en vain) de plaire à la petite princesse. De sa nombreuse parentèle Facilis, Leto ne semble bien disposée qu’envers le jovial Reginaldus, mais elle le maintient quand même lui aussi à bonne distance. Enfin, l’étrange relation entre la princesse et le chevalier Bolzano, toute en ironie et en cynisme apparent, inquiète de plus en plus tous ceux à la cour qui savent à quoi s’en tenir sur le maître jardinier de l’Empereur. Les Facilis (et d’autres avec eux) ont compris que d’une manière ou d’une autre, la petite princesse risquait de peser dans les années à venir.

Le remaniement des légions impériales
De manière superficielle, on pourrait penser qu’en ramenant à 12  le nombre des légions sous son commandement, l’Empereur affaiblirait son propre pouvoir, en mutilant la principale force armée de la nation. En réalité, les choses sont bien plus nuancées. Aloysius sait qu’il ne peut de toute manière diriger l’ensemble des légions sans l’aval du Sénat. Il lui est impossible de devenir un dictateur, car il ne peut se reposer sur la loyauté des praetor en place, qui seraient son seul atout pour forcer les sénateurs à lui obéir. De toute manière, l’Empereur n’a aucune intention de cet ordre. Sa manière de faire est plus simple : il renforce son pouvoir en affaiblissant celui des autres.

Réduire et réorganiser les légions a le mérite de renflouer sensiblement les caisses du trésor impérial, et d’alléger un peu la pression fiscale sur les maisons patriciennes, qui ne peuvent décemment s’en plaindre.
Le fait que cela confère plus de poids aux effectifs militaires des maisons patriciennes est une arme à double tranchant, car cela renforce aussi bien la puissance de tous ceux qui sont hostiles à Aloysius que celle de ses partisans. Évidemment, cela rend aussi l’Empereur plus dépendant de la bonne volonté des Loyalistes, et des pairs en général.
Mais dans le même temps, l’Empereur joue sur les déclarations tonitruantes des Bellicistes, qui se contredisent sans cesse en exigeant à la fois plus d’autonomie et le renforcement de la puissance militaire des légions. Les Bellicistes sont suffisamment déterminés pour rendre confuse la situation au Sénat, sans parvenir pour autant à gagner en influence. Au contraire, les autres sénateurs refusent en majorité d’envisager un nouveau conflit avec la Ligue. En ce sens, la réduction des effectifs des légions et la virulence des Bellicistes outragés permettent à l’Empereur de maintenir ses opposants dans l’indécision, en entretenant leurs divisions sur des questions relativement secondaires.

Le contrôle de la capitale
Si quelques patriciens ont de forts doutes à ce sujet, rares sont ceux qui ont compris la pleine mesure d’une des décisions récentes d’Aloysius. En tant que suzerain de la capitale impériale, qui constitue pour l’essentiel le domaine de la lignée des D’Ambrosia, l’Empereur a ordonné la mise en place d’assemblées populaires locales. Des élections impliquant tous les plébéiens adultes de Celalta doivent être organisées au début de l’année 996. Elles permettront la désignation de représentants des quartiers de la capitale, qui assisteront les fonctionnaires impériaux chargés de l’administration de la métropole. Les modalités de ces élections et les attributions exactes des plébéiens élus n’ont pas encore été rendues publiques, et le souverain s’est contenté de répondre par le silence aux demandes d’éclaircissements à ce sujet.

Certains patriciens y voient une simple manœuvre populiste, un hochet qu’on agite pour distraire le petit peuple. D’autres pensent que l’Empereur se moque ainsi des pairs les plus frondeurs, en leur montrant qu’en tant que suzerain d’un domaine, lui aussi peut user de l’autonomie qu’ils réclament sans qu’on puisse l’en empêcher.

Quelques-uns, notamment parmi les Paritaires, pensent que l’Empereur s’essaie à contourner le pouvoir traditionnel de la noblesse, en donnant à la plèbe de nouveaux droits. Évidemment, cela n’aura aucun effet décisif si ces mesures ne dépassent pas l’établissement d’assemblées populaires cantonnées à la capitale. Mais, pour quelques idéalistes au sein des Paritaires, cela constitue une nouveauté inédite, potentiellement intéressante. Plusieurs envisagent d’ailleurs des mesures similaires sur leurs propres terres. Pour autant, ils restent jusqu’à présent silencieux et observent, attendant de voir ce que tout cela donnera.

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La politique extérieure
La Ligue :
Aloysius ne cache pas qu’il veut préserver la paix fragile entre Celalta et la Ligue. A la fois parce que l’Empire ne s’est pas complètement remis de la Guerre Civile et aussi, plus cyniquement, parce que les tensions internes à la Ligue sont de plus en plus visibles. L’Empereur ne pense pas que les ligueurs en viendront à s’affronter directement, mais tout ce qui renforce leurs divisions ne peut que lui plaire. Il ferme donc les yeux sur une multitude de liens officiels et officieux entre les maisons nobles de l’Empire et la Ligue. Il sait que toutes les rivalités et ambitions sous-jacentes à ces relations commerciales ou clandestines ne sont pas sans danger pour les ligueurs. Il n’est pas encore temps d’agir ouvertement, par exemple en tentant de ramener Bevelenus dans le giron impérial, mais il n’est pas impossible que cela devienne bientôt envisageable… Aloysius ne cherche pas délibérément à briser la Ligue, mais il saisira toute opportunité de l’affaiblir, surtout si cela renforce avant tout le pouvoir des D’Ambrosia, plutôt que celui de leurs « loyaux sujets »

Vallombrosa :
Les relations avec le duché sont bonnes, car durant ses années d’exil chez le Duc Umberto, Aloysius a tissé des liens d’amitié bien réels avec la dynastie de la Vallée des Ombres. La présence des Vallombrosa au Sénat continue à irriter bon nombre de pairs, d’autant plus qu’ils ont gagné de nouveaux vassaux à cause de la Guerre Civile. Des petites maisons indépendantes qui ont prêté allégeance à Umberto, pour gagner un puissant protecteur face aux appétits des grandes familles patriciennes. Dans le même temps, les Vallombrosa se mêlent peu aux coteries du sénat et sans véritablement être des alliés d’Aloysius, ils constituent au moins un facteur de stabilité sur lequel il peut parfois se reposer.

Le Lyrriane :
Le protectorat lyrrien reste problématique, comme il n’a cessé de l’être depuis qu’il est tombé sous la coupe de Celalta. La présence durant la Guerre Civile d’agents de la Ligue au sein des autonomistes lyrriens est un fait prouvé, et les espions d’Aloysius lui ont confirmé que certains étaient encore actifs. La bonne nouvelle, c’est que cette ingérence des ligueurs a fait croitre les tensions entre les groupes autonomistes, déjà divisés par les rivalités. Pour autant, si une guerre civile venait à éclater au Lyrriane, Aloysius pourrait difficilement soutenir le Vice-roi avec ses légions sans fragiliser davantage sa position vis à vis de la Ligue. Et cela, l’Empereur est loin d’être le seul à s’en être rendu compte…

Les autres puissances :
Dans l’ensemble, elles ne constituent pas des enjeux majeurs pour l’Empereur, même s’il s’efforce de les garder à l’oeil. Notamment la Cité Sainte car l’Église Séraphique est tout aussi présente dans les frontières de l’Empire que celles de la Ligue. Un rapprochement avec le petit royaume de Belvorov, qui n’apprécie guère la Cité Sainte, est peut-être à envisager, Carte-couleursmême s’il ne pèse pas lourd et se trouve désormais séparé de l’Empire par les territoires des ligueurs. Le Mandato a envoyé des agents dans les Froidelandes, histoire de garder un oeil sur les barons landiers et leurs mercenaires. En effet, tout mouvement significatif dans cette direction pourrait trahir les plans de la Ligue ou des plus puissantes factions lyrriennes opposées à Celalta. Les leçons de la Guerre Civile n’ont pas été perdues pour tout le monde…

L’Empereur ayant désormais une bonne idée de la situation politique intérieure, il a décidé de s’occuper de problèmes plus périphériques, comme la marche brumaire. Il n’a pas d’intention avérée à l’égard des colons de la marche, mais il estime que Valerius n’aurait pas dû les abandonner à leur sort. Des agents impériaux sous couverture ont donc été envoyés sur place, afin de fournir au souverain une vue d’ensemble de la marche et des notables qui y vivent. Le fait que plusieurs maisons patriciennes proches de la Trouée des Lames aient fait preuve d’intérêt pour la marche ces dernières années nécessite également une surveillance attentive. A tout prendre, l’Empereur accepterait volontiers une marche sécurisée, en partie autonome et alliée à Celalta. Cela serait certainement plus judicieux pour établir de bonne relations avec les colons (et les quelques clans brumaires amicaux) qu’envoyer un fort contingent militaire reprendre le contrôle de territoires laissés sans protection par Celalta il y a plus de dix ans… cependant il n’est pas dit que les Oranius ou certains de leurs voisins voient les choses du même œil.

Au niveau maritime, il faut toujours compter avec les corsaires mearans et les pirates de Vizzini, mais la naissance de la Ligue a changé la donne. Si les capitaines de Portoverde commirent de nombreuses exactions durant la Guerre Civile, la cité d’ardoise verte reste le principal port de commerce des ligueurs. Portoverde vit des échanges maritimes, notamment avec l’Empire. Elle se trouve par ailleurs très proche de la frontière et serait vulnérable si les hostilités entre la Ligue et Celalta reprenaient. Les corsaires des Mazziani se concentrent donc désormais sur leurs rivaux de Meara et les pirates vizzini. On peut difficilement parler de situation idyllique, notamment entre les Mazziani et les Bellacqua de Bellona, mais les affaires sont les affaires…

Par ailleurs, le Doge de Meara a entamé une opération de séduction ciblant les maisons de Bellona et d’Adranto impliquées dans le commerce maritime. Des émissaires charmants ont été envoyés aux Avernus et aux Bellacqua entres autres. Un nouvel ambassadeur est récemment arrivé à Celalta, avec des monceaux de présents pour l’Empereur et ses héritiers. Pour Aloysius, cela ne peut signifier qu’une seule chose : Meara souffre beaucoup trop aux yeux du Doge de l’audace des corsaires de Portoverde…

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